
A Paris, le 23 avril 2025
Madame Élisabeth Borne,
ministre d’État de l’Éducation nationale,
de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche,
110 rue de Grenelle
75007 PARIS
Objet : Budget 2026
Madame la ministre,
Dans le cadre de la construction du budget 2026, le ministre de l’Économie vient d’annoncer 40
milliards d’euros d’ efforts supplémentaires. De son côté, la porte parole du gouvernement annonce
qu’entre 40 milliards et 50 milliards d’euros d’économies sont « à trouver » pour le budget 2026.
Nous avons également pris connaissance de la circulaire envoyée par le ministère de l’Économie à
tous les ministères dans laquelle il est demandé « d’identifier et de présenter un niveau ambitieux de
diminution des effectifs » et qui précise « toute mesure nouvelle devra être gagée intégralement par
une mesure d’économie pour être admise ». Après un budget 2025, comportant des mesures
synonymes de reculs sociaux et environnementaux, passé en force avec l’article 49-3, nous
dénonçons fermement toute mesure qui dégraderait l’avenir du service public d’Éducation.
Notre École a toujours les classes les plus chargées d’Europe, la crise d’attractivité s’enracine et ne
peut être résolue qu’avec un ensemble de mesures, dont des augmentations substantielles de
rémunérations pour tous les personnels et une amélioration des conditions de travail. Les personnels
sont épuisés et ont vu le sens de leur métier sans cesse remis en cause par des réformes brutales,
pensées sans eux et qui dégradent leur quotidien professionnel. L’année 2024 et l’année 2025 ont montré à quel point la situation est critique dans notre secteur : en plus des éléments évoqués ci-
dessus, le ministère a rogné sur les remboursements de frais de déplacement des personnels, a tenté de couper les HSE, a rogné sur le Pass Culture, comptant sur la bonne volonté des personnels pour
continuer d’exercer pleinement leur mission à moindre frais.
Par ailleurs, des collègues non titulaires ont vu, brutalement, leur contrat non reconduit par certains
rectorats. Il a fallu toute la pression syndicale et médiatique pour que ces rectorats fassent machine
arrière. Ce manque de considération pour des personnels précaires n’est pas acceptable.
Le service public d’Éducation ne tient plus qu’à un fil : celui de la conscience professionnelle de
nos collègues. Tirer sur ce fil, sans répondre aux attentes et aux urgences, à commencer par celles
des rémunérations et des conditions de travail, serait une forme de cynisme irresponsable qui ne
pourrait qu’aggraver davantage la crise dans l’Éducation nationale.
L’annulation des 4000 suppressions d’emplois de professeurs pour la rentrée 2025 a été un premier
pas, mais le compte n’y est pas. Notre premier bilan de préparation de la rentrée 2025 montre que
les fermetures de classes sont très nombreuses dans le premier degré (pas moins de 5000 selon nos
chiffres). Dans le second degré, de nombreux établissements subissent des baisses de DGH, les
dotations vie scolaire restent insuffisantes : tout cela ne permet pas d’améliorer de manière
significative les conditions d’études des élèves, le climat scolaire et les conditions de travail des
personnels. Faute de moyens suffisants, la qualité de scolarisation des élèves en situation de handicap ne s’améliorera pas. Dans les écoles, collèges et lycées l’ensemble des personnels (professeurs, AESH, AED, Psy-EN, CPE, personnels administratifs, personnels de direction, assistantes sociales, infirmières scolaires, ITRF, médecins scolaires) voient se profiler une nouvelle rentrée dans des conditions de travail très dégradées. Les mobilisations des personnels, des parents d’élèves et des élus locaux se multiplient depuis le mois de janvier. Nos organisations syndicales soutiennent toutes ces mobilisations et contribueront à les amplifier.
Les organisations syndicales, représentatives des personnels qui font l’École au quotidien, au plus
près de l’ensemble de la population du pays, refusent toute nouvelle instrumentalisation de la baisse
démographique pour justifier des suppressions d’emplois (comme le préconisait le rapport de l’IGF
et l’IGESR que vous aviez commandé à l’automne 2023 à Matignon). Nous refusons aussi la
perspective d’une année blanche en matière de revalorisation salariale. Nous n’accepterons pas les
renoncements budgétaires à améliorer les conditions de travail et de rémunération des personnels, à
améliorer les conditions de scolarisation des enfants et adolescents.
Nos organisations FSU, UNSA Éducation, FNEC FP FO, CFDT EFRP, CGT Educ’action, SNALC
et SUD Éducation vous demandent l’ouverture de discussions dans le cadre d’une réunion
multilatérale ou d’un CSAMEN en votre présence, sur les orientations budgétaires portées par votre
ministère au sein du gouvernement. Ce dialogue ne peut plus se limiter à la présentation une fois par
an de la répartition académique des créations et suppressions d’emplois après l’adoption de la loi
de finances initiale. Il est temps d’ouvrir la boîte noire de la préparation du budget. Les décisions
budgétaires du gouvernement et du Parlement ont des conséquences pour le service public
d’Éducation et pour le travail des personnels par bien d’autres aspects que la carte des emplois. Ces
décisions ne peuvent donc être prises sans prendre en compte les revendications de nos
organisations qui relayent ainsi les attentes et exigences des personnels. A défaut, nos organisations
sont prêtes à préparer et organiser les mobilisations pour faire aboutir nos revendications pour le
service public d’Éducation, la revalorisation des personnels et l’amélioration des conditions de
travail des personnels et d’étude des élèves.
Veuillez recevoir, Madame la ministre, nos respectueuses salutations.
L’intersyndicale FSU, UNSA Éducation, FNEC FP FO, CFDT EFRP, CGT Educ’action, SNALC et
SUD Éducation.