L’annonce d’une reprise progressive des cours le 11 mai suscite la colère des personnels de l’Education nationale.
Après des semaines où l’impréparation (au bout d’un mois de confinement, les masques commencent à arriver mais en nombre insuffisant) le dispute à l’absurdité (utiles quand il n’y en a, les masques deviennent inutiles quand il n’y en a plus…) et au mépris (les déclarations de la porte-parole sont dans toutes les mémoires),
Si elle n’était pas cousue de contradictions, la décision du président Macron et du ministre Blanquer pourrait sembler guidée par la volonté de remettre les élèves au travail. Mais elle est d’une gravité sans précédent.
Pourquoi serait-il sans risque d’ouvrir les écoles, les collèges et les lycées quand les cinémas, les théâtres, les restaurants resteront fermés ?
Comment n’y aurait-il pas de contamination dans des lycées à plus de 1000 élèves quand il y en aurait dans un restaurant avec 30 adultes ?
Comment respecter les gestes barrières dans des cours de récréation où s’entassent 700 élèves ?
Comment garantir les distances sanitaires à 35 élèves par classe ?
Comment croire que le ministre qui a battu le record du nombre de fermetures de collèges REP se soucie maintenant en priorité des élèves en situation de décrochage scolaire à cause du confinement et qu’il veut faire revenir en priorité ces élèves dans les établissements ?
Comment assurer que les établissements ne deviendront pas des foyers de contagion sans tester tous les élèves et les personnels ? Ou quand le gouvernement annonce des masques standards, alors qu’il faudrait en changer au moins 4 fois par jour et que les personnels qui accueillent les enfants des soignants n’en ont déjà pas actuellement ?
Pourquoi les étudiants de BTS et de l’université ne reprendraient-ils pas les cours alors qu’ils sont dans la même situation sanitaire que les autres élèves ?
Quelle est la logique dans tout cela ?
Alors pourquoi vouloir les exposer délibérément à une contagion de masse ?
Pourquoi choisir d’exposer les personnels, dont certains ont une santé fragile, aux milliers de porteurs sains que sont les élèves ?
Pourquoi multiplier les risques d’exposer les élèves eux-mêmes alors que l’on découvre des cas de décès chez des patients de plus en plus jeunes ?
Pourquoi multiplier les risques au moment où l’on découvre que les personnes qui ont eu le covid-19 peuvent le présenter de nouveau ?
Pourquoi prendre une telle décision au moment où l’OMS alerte sur le danger d’une deuxième vague de contamination ? « Lever les restrictions trop rapidement pourrait entraîner une résurgence mortelle » de la pandémie, a déclaré Tedros Adhanom Ghebreyesus, le directeur général de l’organisation.
Pourquoi saturer les services au moment où l’épidémie atteint un seuil critique et que les hopitaux d’Evreux, Verneuil et Pont-Audemer tirent la sonnette d’alarme ? Comme si les personnels hospitaliers n’étaient pas à bout de force après un mois ?
Depuis quelques jours, les pressions du MEDEF se sont multipliées, le chantage au chômage dans le privé et à la confiscation des congés dans le public n’était plus dissimulé. « Le 11 mai, il s’agira aussi de permettre au plus grand nombre de retourner travailler, redémarrer notre industrie, nos commerces et nos services » a déclaré E. Macron le 13 avril.
Dans son allocution, le président de la République a clairement désigné les enseignants comme la « 2ème ligne » après les soignants. On n’attend plus seulement de l’Education nationale qu’elle remplisse avant tout une fonction de garderie, mais bien qu’elle s’expose pour que les entreprises puissent recommencer à produire.
On comprend alors pourquoi les étudiants ne reprennent pas les cours : ils sont majeurs et ne sont plus sous la responsabilité de leurs parents. Ils peuvent se garder tout seuls.
Le ministre Blanquer a mis en avant l’urgence sociale à ramener dans les établissements des élèves qui, sans contact avec l’école, seraient en danger en situation de confinement. Selon sa logique, le plus grave danger ne serait donc plus de les exposer au covid-19 ! Cette décision expose donc en priorité les familles des milieux les plus défavorisés.
Quand l’économie prend le pas sur le respect des règles sanitaires, tous les personnels et les élèves sont délibérément mis en danger. C’est révoltant !
Au journaliste qui lui demande si professeurs et élèves auront des masques, le ministre répond que « c’est fort possible », mais que « ce sera déterminé avec autorités sanitaires. Si c’est nécessaire, on le fera » (France 2 lundi 14 avril). Par quel miracle les masques peuvent-ils soudain ne plus être obligatoires et indispensables quand des millions d’élèves et de personnels sont regroupés dans les établissements ? Au passage, le ministre sait-il seulement comment on fait cours avec des masques sur le visage ?
Comment peut-il imaginer que des enfants de petites sections respectent les gestes barrière ?
Lors du comité hygiène et sécurité du jeudi 9 avril, la fédération FO de l’enseignement de l’Eure est intervenu pour demander
la protection de tous les personnels (masques, savon, gel, …), notamment pour les personnels les volontaires pour accueillir les enfants des personnels soignants ;
le dépistage de tous les personnels et des élèves avant toute reprise ;
le respect du volontariat et la protection des personnels contre l’impact du télétravail sur les conditions de travail (consignes contradictoires et culpabilisantes, respect de la réglementation sur le télétravail, …) ;
le respect du droit à la déconnexion pour tous.
Hier, le président et le ministre Blanquer ont déclaré que le retour serait progressif. Ils envisagent des aménagements pour alléger les effectifs avec une partie des cours en présentiel et une autre en télé-enseignement. Il déclare qu’il compte sur les organisations syndicales et lycéennes pour co-construire ce retour progressif.
Que prévoit le ministre ? Que chaque enseignant fasse le double de cours : un pour chaque moitié de classe ? Des cours en téléenseignement pour ceux que les parents refuseraient d’envoyer en cours ? Dans ce cas des cours vont-ils être supprimés et les emplois du temps refaits ?
Que le ministre comprenne clairement qu’il ne peut attendre aucune aide de FO pour organiser la mise en danger de milliers de personnels et d’élèves.
Qu’il ne compte pas sur la fédération FO de l’enseignement de l’Eure pour doubler la charge de travail des enseignants qui devraient assurer des cours devant les élèves et préparer dans le même temps des travaux en télé-enseignement !
Au nom de la primauté de l’économie, le gouvernement envoie les enseignants en première ligne pour être contaminés et contaminer à leur tour leur famille ? Il n’en est pas question !
Pour la FNEC FP FO 27, il ne peut y avoir de reprise des cours sans dépistage systématique de tous les élèves et personnels et sans confinement des personnels testés positifs.
Si le ministre et le gouvernement persistaient dans leur aveuglement, la FNEC FP FO 27 prendrait toutes ses responsabilités en soutenant toutes les demandes de droit de retrait Au plan national, la fédération FO de l’enseignement a déposé un préavis de grève pour couvrir tous les personnels qui refuseraient cette mise en danger collective des personnels et des élèves.